La ville de Mezzouna, dans le gouvernorat de Sidi Bouzid, a été secouée par une tragédie qui a mis en lumière les failles criantes de la gestion publique et la profonde exaspération d’une population marginalisée. Le 14 avril 2025, l’effondrement partiel d’un mur vétuste au sein du lycée secondaire a coûté la vie à trois élèves âgés de 18 à 19 ans et blessé grièvement deux autres. Cet accident dramatique, loin d’être un simple fait divers, a révélé l’ampleur d’une crise structurelle et déclenché une vague de protestations d’une rare intensité.
Une catastrophe annoncée et des infrastructures à l’abandon
Selon les témoignages recueillis sur place, le mur en question avait été construit dans les années 1980 et présentait depuis plusieurs années des fissures inquiétantes. Les enseignants et la direction de l’établissement avaient à maintes reprises alerté les autorités régionales sur l’état de délabrement du bâtiment, sans obtenir de réponse ni d’intervention concrète. Le dortoir des élèves avait même dû être fermé par précaution, tandis que d’autres parties du lycée menaçaient également de s’effondrer
La vétusté des infrastructures scolaires n’est malheureusement pas un cas isolé à Mezzouna. Elle illustre un problème plus large de marginalisation et de négligence administrative, aggravé par la lourdeur des procédures et le manque de réactivité des responsables. Les secours, eux aussi, ont mis du temps à intervenir, faute de moyens adéquats sur place. Il a fallu attendre l’arrivée d’une équipe de Regueb, distante de 30 kilomètres, alors que les blessés gisaient sous les gravats
Colère, deuil et mobilisation sociale
Le drame a provoqué une onde de choc dans toute la région et au-delà. Dès le lendemain, des centaines d’habitants se sont rassemblés devant le poste de la garde nationale pour réclamer justice et dénoncer l’abandon de leur ville. Les slogans scandés exprimaient une colère profonde : « Nous n’avons ni travail, ni protection, ni rien du tout ! Mezzouna est marginalisée » Des pneus ont été brûlés, des routes bloquées, et des commerces fermés en signe de protestation
L’Union générale tunisienne du travail (UGTT) a appelé à une grève générale dans les établissements scolaires, dénonçant l’échec des autorités à garantir la sécurité des élèves et à prendre des mesures sérieuses pour sauver l’école publique. La Fédération générale de l’enseignement secondaire a également exigé la suspension totale des cours dans tout le pays, soulignant la gravité de la situation et l’urgence d’une refonte du système éducatif
Répression et absence de réponses concrètes
Face à la montée de la contestation, la réaction des autorités a été marquée par un déploiement sécuritaire massif et des interventions musclées. Des affrontements ont éclaté entre manifestants et forces de l’ordre, entraînant des blessés parmi les citoyens et l’arrestation de plusieurs protestataires. Cette réponse répressive n’a fait qu’attiser la frustration et renforcer le sentiment d’injustice au sein de la population locale
Jusqu’à présent, aucun communiqué officiel n’a apporté d’éclaircissements sur les mesures envisagées pour remédier à la situation, ni sur les responsabilités des différents acteurs institutionnels. Le président Kaïs Saïed s’est rendu sur les lieux plusieurs jours après le drame, mais son déplacement n’a pas suffi à apaiser la colère des habitants, qui continuent de dénoncer l’absence de projets concrets et la politique d’improvisation qui prévaut dans la gestion des affaires publiques
Un symbole de la crise nationale
La catastrophe de Me